Aujourd'hui, j'ai eu envie de republier un vieux billet en date du 24 mars 2006. Vous pourriez penser que c'est par manque d'inspiration, voire par paresse. Et bien évidemment vous ne seriez pas loin de la vérité.
Sauf que. Sauf que si je republie ce billet, c'est aussi en raison d'un commentaire ajouté récemment par Raphaëlle. Un commentaire qui montre s'il en est besoin que rien n'est simple et que dans la vie, tout n'est pas noir ou blanc. Il y a beaucoup de rose aussi. Alors voilà le billet, suivi du commentaire.
Comme me le faisait remarquer récemment une amie qui revenait d'une énième "première visite" chez un nouveau médecin, il se produit lors de la rencontre entre la ronde et le nutritionniste un phénomène assez particulier.
Après s'être répandue en confidences intimes, après avoir offert son corps à la balance et au centimètre, après s'être en général entendue dire que l'amaigrissement était nécessaire, voire urgent, voire salutaire et après avoir scrupuleusement écouté les conseil du nouveau diététicien, la ronde est saisie d'une sorte d'euphorie, accompagnée d'un espoir insensé.
Cette fois-ci, se dit-elle quasi systématiquement, mais oubliant qu'elle en avait déjà été sûre la fois d'avant, c'est le bon. Ou la bonne. Il ou elle va voir ce qu'il va voir. La ronde se sent pousser des ailes, elle va respecter à la lettre toutes les consignes et à la prochaine visite, le nutritionniste sera impressionné. Le mot est laché. La ronde veut lui en mettre plein la vue. Elle veut que son nouveau mentor soit fier d'elle. Elle veut peut-être même lui plaire. Se transformer, comme le crapaud devient prince. Se révéler à cet être qu'elle ne connaissait encore pas hier. Elle veut qu'il la félicite comme le faisaient ses professeurs au collège lors d'une dictée sans faute. Il lui a fixé comme objectif de perdre deux kilos en trois semaines ? Elle s'affamera s'il faut mais c'est délestée du double qu'elle se présentera à lui au prochain rendez-vous.
C'est là le problème. Et c'est probablement pour cela justement que ça ne marchera pas... Tant que la ronde aura besoin du regard d'un autre pour perdre son poids, elle n'y arrivera pas. Parce que le coup de foudre de la première séance ne dure jamais. Et que fondamentalement, le médecin en question se fiche pas mal de ses prouesses. Alors, déçue et vexée comme une amante éconduite, la ronde se réfugiera une fois de plus dans les douceurs du sucre et du beurre...
Derrière la figure emblématique du médecin, la ronde sait bien qu'une autre se cache. Mais s'avouer à son âge que c'est sa mère qu'elle voudrait impressionner n'est pas chose aisée...
Réponse de Raphaëlle:
JE vais avouer un truc terrible, qui va, je le sens, me faire bannir à tout jamais de ton blog. Comment dire une chose pareille?
Alors voilà, euh... je suis fille de nutritionniste. Pour être plus précise, d'un médecin généraliste, spécialiste des maladies du métabolismes et par extension, nutritionniste. Voilà, je l'ai dit, je suis née d'un antéchrist
Au delà de ce scoop o combien intéressant, ce que j'ai envie de raconter rapido, c'est l'envers du décor; Ou comment un nutritionniste se nourrit lui-même.
1- Mon père cache des bonbons, des tonnes de bonbons dans son armoire, sous ses chemises d'homme responsable et digne ( quand tu es gamine et que tu trouves la cachette du trésor, c'est juste le Pérou). aujourd'hui, à 60 ans et après des problèmes de santé divers et variés, il a remplacé les car en sacs and co par des bonbecs sans sucre, mais l'idée de la transgression folle du sucré reste la même.
2- Mon père est un dingue de la bouffe. Il est né dans une famille pleine de femmes cordons bleus, spécialistes de la patisserie au miel. Chaque réunion familiale est l'occasion pour lui de s'avaler des dizaines de cigares aux amandes etc. Cela, évidemment, après un repas conséquent genre couscous. Mais il trouve toujours de a place. Et si, après, il y a un macaron qui traîne, il ne dit pas non.
3- Mais mon père est aussi un grand dingue de son poids. Forcément. Alors après ses périodes d'éclatade calorique, régime. façon militaire, genre une pomme et un fromage blanc le matin, et un sachet protéiné midi et soir. Il peut s'imposer ça pendant des semaines. Quitte à se niquer les reins, mais on a un problème psy ou on ne l'a pas. Inutile de lui faire remarquer qu'il aurait crucifié n'importe quel patient qui se serait imposé un truc pareil, il le sait. Inutile de lui dire qu'il ferait aussi bien de bouffer du blanc de poulet, par exemple, il le sait aussi.
Voilà, je suis la fille d'un incube. Mais d'un incube que je trouve très touchant dans sa névrose. Et puis, c'est pas un méchant, il est tombé raide dingue fou amoureux de ma mère, délicieusement ronde et "moelleuse", comme dit Bubblecannelle, parce qu'elle lui faisait penser à un personnage d'Ingre. Et je ne l'ai jamais rien entendu dire sur mon poids. En fait si : quand je suis au régime, je suis sûre d'entendre : " t'es trop maigre". Ce qui, entre nous, est gravement faux.
Ce que je voulais dire, donc, avant de m'interrompre sottement par des détours autobiographiques qui n'intéressent que moi, c'est, certes, que j'aime mon papa et que tous les nutritionnistes ne sont pas des enfoirés. Mais ça, tu dois le savoir. JE voulais dire aussi qu'il faut avoir soi même un léger problème avec la bouffe pour bosser dans ce domaine si particulier.
Et je suis bien contente, aussi, que tu aies l'air de te sentir suffisamment bien avec toi même pour en avoir fini avec la tournée de cette profession.
Edit: Sur le billet du 24 mars, il y a aussi un commentaire de Lafaby extrèmement touchant.