Tu portais des foulards. Tous les jours, toutes les saisons. Cette habitude était ancienne, je me souviens qu'adolescent tu me piquais les miens. C'était ton excentricité, ces tissus bigarrés qui flottaient autour de ton cou.
Oui, si je ne devais retenir qu'un trait de toi, ce serait cela.
Viendraient ensuite ton rire aigu et cette façon de regarder les gens en penchant la tête lorsque tu étais gêné ou que tu voulais séduire.
Il y a quelque temps, ton frère m'a donné un de tes foulards. Mon premier réflexe a été d'y enfouir le nez pour t'y retrouver. Mais il n'y avait qu'une odeur mélangée de soie et de poussière. Je l'ai ensuite accroché à un cintre dans mon armoire, un peu désemparée, ne sachant pas trop que faire de ce vestige de toi.
Et puis la semaine dernière, j'avais un peu froid et le décolleté de ma robe était trop profond. Alors j'ai enroulé cette écharpe légère autour de mon cou, en me disant que si c'était trop étrange, je la remiserais au fond de mon sac.
J'avais peur que ce soit un peu morbide, j'avais peur que cela me rende mal à l'aise. Et c'est tout le contraire qui s'est produit.
Je n'avais pas retrouvé ton parfum en cherchant des effluves disparus mais là, tu étais à mon cou. Les premiers instants, les larmes sont montées, puis la tristesse s'est fait plus douce. Imperceptible et léger, tu m'as accompagnée toute cette journée.
L'idée de ta disparition sera-t-elle un jour supportable ?