Allez, moi je dis que ça fait un bail que je n'ai pas hurlé dans le poste. Non mais c'est vrai, mon grand cri, c'est comme s'il avait disparu non ? Limite je m'interroge sur ma capacité de révolte qui se serait fait la malle.
Du coup, j'ai épluché le Elle cette semaine, en me disant que si je ne trouvais rien à redire à tout ce qui était écrit à l'intérieur, c'en était fait de moi, voilà, j'étais passé du côté de la force obscure.
Bon ben je te rassure, j'ai finalement déniché une petite perle.
Dans un article consacré aux gros qui sont fashion.
Je sais, ça faisait bien trois semaines qu'on nous avait pas montré le petit cul de Scarlett Johanson en nous expliquant que les grosses sont meilleures au lit. Mais t'emballe pas tout de suite, faut bien que j'avoue que cette fois-ci, les personnes enveloppées dont la journaliste nous parle sont vraiment des "big size" comme ils disent.
Marianne James, Chabal ou Mouloud, l'animateur de Canal, genre. Donc pour une fois, l'hypocrisie n'est pas trop au rendez-vous. Mais y'a quand même eu matière à me faire monter sur mes grands canassons.
Parce que pour nous expliquer que cette fois-ci, a y'est, les gros sont pile dans la tendance, on nous donne aussi l'exemple de la chanteuse anglaise obèse, Beth Ditto, qui fait un carton partout et notamment en posant à poil à la une des magazines sans le moindre scrupule. Grand bien lui en fasse d'ailleurs parce que wouah elle décoiffe la nana.
Mais ce qui m'a légèrement chauffée, c'est que pour prouver à quel point c'est du délire la hipness qu'elle dégage, on nous explique que, unbelieveable, autrement dit, incroyabeule, Kate Moss "en personne" ose s'afficher avec elle dans une boîte à la mode! Dingue. Dis moi pas que c'est pas vrai.
Genre Kate, elle aurait même pas peur que ça déglingue son image tu vois ? Et que peut-être même elle aurait compris que ça n'est pas contagieux !
Bon moi je trouve ça super hein, que Kate elle fasse copain copine avec la fat-girl. M'enfin de là à m'esbaudir et à crier victoire parce que la brindille enfarinée ose adresser la parole à une fille qui a les cuisses qui se touchent, non. Parce que s'étonner que Beth ait accès aux discothèques trendy de London et que des gens bien sous tout rapport - sous entendu minces - acceptent même d'être pris en photo avec elle, c'est reconnaître implicitement le côté exceptionnel de la chose.
A ce stade du billet, je me dois d'admettre que peut-être, éventuellement je ne suis pas totalement objective dans ma colère. Que peut-être on peut y déceler les restes de la douleur éprouvée lorsqu'adolescente un malabar au QI de Greg le millionnaire m'a expliqué que "tes copines, elles rentrent, d'accord, mais toi, non".
Oui mais non. Parce que figure-toi que j'ai beaucoup travaillé sur cet épisode douloureux. Aujourd'hui je lui pisse à la raie à ce salopard de videur.
Ok, c'est encore un peu sensible. En même temps il y a encore deux ans même pas j'osais passer devant une boiteudenuit.
Bref, moi je crois que si Beth Ditto est appréciée par Kate et ses cop's, c'est surtout parce qu'elle a du talent. Et en effet on peut se réjouir que ce talent lui soit reconnu malgré un physique hors-norme. Espérons juste que pour une Beth il n'y aura plus des dizaines de shirley, natasha ou caroline - prénom choisi complètement au hasard, je te rappelle que j'ai fait un gros travail sur moi même - refoulées à l'entrée des endroits branchés pour défaut de glamour ou surplus de lipides. Espérons que ces deux trois people en vogue ne soient pas l'arbre qui cachent la forêt et que la mode de l'énorme ne soit pas aussi factice et éphémère que celle du lino ou des caleçons déguisés en leggings.
Pour finir, moi personnellement, je ne suis pas pour la glorification subite des très gros. D'abord parce qu'il faut ne jamais avoir souffert de surpoids pour imaginer que c'est cool de peser 100 kilos. Ensuite parce que ce n'est finalement qu'une stigmatisation de plus. Ces gens avant d'être gros ils sont des être humains. Un peu comme moi avant d'être blonde je suis femme, tu vois ? Même si je te l'accorde, mon blond il tue.
Plus sérieusement, je rêve d'une société qui ne pousse plus les gens à se gaver d'un côté tout en les effrayant de l'autre sur les conséquences des kilos pris. Je rêve d'un magazine où il ne serait plus qestion une semaine d'acclamer les rondeurs et l'autre de prescrire des régimes intenables et dangeureux.
Mais bon, je ne suis pas Martin Luther King et même lui d'ailleurs son rêve, on ne peut pas vraiment prétendre qu'il soit devenu réalité.
Alors je vais me contenter de pousser mon cri, sans vraiment savoir contre qui ou quoi d'ailleurs. Juste tenter de ne pas me laisser endormir par deux trois fausses idoles qu'on veut m'imposer et qui demain seront ringardes comme les bottines ou le gris, le fameux noir de cet hiver qui l'année prochaine redeviendra fatalement et banalement...gris.
AAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHH.