Hier matin, ma grande s'est réveillée toute cernée, avec un vilain mal de tête. Je l'ai regardée prendre son courage à deux mains et s'habiller malgré tout alors que l'iroquoise et moi étions encore au lit. Et puis soudain je me suis dit que bientôt, presque demain, il n'y aurait pas d'alternative et que même fiévreuse il faudrait qu'elle aille à l'école. Vaille que vaille, on redeviendrait les bons petits soldats travailleurs.
Alors pour la forme, j'ai pris sa température et malgré un minuscule 37,7 j'ai décrété que pour aujourd'hui ce serait lit à volonté. Elle n'a pas demandé son reste, enlevant son pantalon et se glissant plus vite qu'il ne faut pour le dire sous ma couette.
Les garçons sont partis à regrets, ils pétaient la forme, tant pis pour eux.
Et toutes les trois, on s'est serrées sous les draps. ça sentait un peu le caca, un peu le dodo, un peu la fièvre, c'était tout chaud, c'était tout doux. Le monde pouvait bien continuer de tourner, on n'en avait cure, le lit était notre maison, les couvertures et oreillers nos remparts.
Pendant ces heures volées, notre radeau a vogué au gré d'histoires chuchotées, de babillages hésitants et de baisers étouffés.
Après, la vie a repris ses droits, la fièvre est tombée, l'iroquoise a pleuré, il a fallu se lever.
L'échappée belle était terminée...