J'ai été prise à partie assez vigoureusement depuis deux jours par une blogueuse au sujet de cette photo de femme sur la plage que j'ai mise en ligne pour illustrer un billet censé aller à contre-courant de l'article du Elle sur de soit-disant rondes qui flottent dans du 40.
On me dit notamment que c'est "honteux" de me servir de l'image d'une femme qui n'a rien demandé, on sous-entend même que quelque part je suis en train de me faire de l'oseille sur son dos, rapport que je suis vendue au grand capital de la publicité.
J'ai envie de répondre parce que contrairement à ce qui est insinué par cette même blogueuse, mon melon n'est pas tel que je suis incapable de me remettre en question ou d'entendre ce qu'on me reproche.
Je me suis posée la question de la diffusion de ce cliché, pas celui de dos que je considère comme irréprochable, rien ne ressemble à une femme en maillot de dos qu'une autre femme en maillot de dos. Mais celui de profil, peut prêter à discussion, je le concède. Cela dit, je persiste à penser qu'une photo prise il y a près de trois ans en Espagne représente peu de risque pour cette femme d'être identifiée. D'autant qu'on n'aperçoit qu'une partie de son visage, l'autre étant cachée par la tête (de dos) de son homme. Surtout, je me dis, cette femme aurait correspondu aux canons en vigueur, personne j'en suis certaine, n'aurait été choqué. Mais là, forcément, on se dit qu'elle pourrait être blessée d'être ainsi exhibée. Rapport à ses poignées d'amour, en somme. Alors que le texte illustrant la photo est tout sauf malveillant et les commentaires unanimement élogieux. Par ailleurs, il ne s'agissait pas d'une relation adultère qui pourrait rendre ce cliché compromettant, à moins qu'on ait l'habitude en Espagne d'aller à la plage avec non seulement le mari d'une autre mais aussi toute sa famille.
On me dit également, avec une certaine ironie, "pourquoi pas des photos de toi, au moins tu serais dans la légalité". Premièrement parce que j'ai du mal à me prendre moi même en photo de dos et que l'homme est le plus piètre photographe que la terre ait portée. Que je suis loin d'être aussi gracieuse que cette femme de dos en maillot et que l'idée était de montrer une femme bien dans sa peau ce que je ne suis pas et n'ai jamais prétendu être. Deuxièmement, j'imagine la bronca si je m'étais ainsi immortalisée en expliquant que je voulais montrer ce que c'était d'être belle et ronde. Bonjour la grosse tête, me serais-je pris en pleine face. Certaines blogueuses pratiquent l'autoportrait, certaines avec plus de bonheur que d'autres. ça n'a jamais été mon fond de commerce, je ne vais sûrement pas commencer maintenant.
Bref, je respecte le droit à l'image. Je crois qu'en trois ans de blogging, c'est la première fois que se pose le problème. Mais je m'interroge. Si on ne peut plus illustrer le moindre article (et là je m'éloigne du blog) avec un cliché représentant un être humain à qui il n'a pas été possible de lui demander l'autorisation, que va devenir l'art de la photographie, le métier de photographe de presse ? Attention, je ne me mets pas sur le même plan, évidemment. Mais c'est une question qui m'interpelle depuis longtemps et je sais que le débat existe, les photo-reporters ayant de plus en plus de mal à pratiquer leur métier, en raison d'une législation de plus en plus contraignante.
Par ailleurs, revenons deux secondes sur la pub.
Ben en fait, je ne vais pas tenter de me justifier. Je fais ce que je veux, après tout. Je me suis fixée mes propres principes. Ne jamais vanter les mérites de telle ou telle marque qui m'aura au préalable rémunérée pour le faire. En d'autres termes, non au publi-reportage, je l'ai fait une fois, ce n'est pas mon truc. Cela dit je ne vois pas où est le problème du moment où on est clair sur le sujet. Après, que des encarts publicitaires - rares en ce moment - me rapportent un peu de sous, je ne vois pas là non plus où est le problème éthique. La presse n'existerait pas sans la pub et le fait d'en avoir ici me permet de mettre du beurre dans les épinards, je n'en ai pas honte une seule seconde.
Voilà, je sais que je donne un peu le bâton pour me faire battre, forcément il y aura des pour et des contre. Et tant mieux, la polémique je ne déteste pas. Ce qui me hérisse en revanche c'est le ton condescendant des donneurs de leçon. Pour info, j'ai retiré la photo de profil, après y avoir bien réfléchi. Mais je laisse celle de dos, parce qu'elle ne peut absolument pas être identifiable. Et je m'excuse auprès de cette femme si d'aventure elle s'était reconnue et qu'en elle avait subi un préjudice moral.