Alors voilà, j'arrive au terme d'une semaine hors les murs. Je ne vais pas faire un bilan, ce serait prématuré et je crains d'être à peine moins instable que dans les jours suivant ma démission. A savoir que je trouve cette nouvelle vie merveilleuse puis l'instant d'après je suis rattrapée par cette peur panique d'avoir commis une énorme bourde. Pas de bilan, mais quelques réflexions glanées ça et là, sur ça et d'autres choses...
- Quand on a été soumis à des horaires de bureau pendant quinze ans, c'est extrêmement compliqué de ne pas se culpabiliser à la moindre pause, sous prétexte que d'ordinaire, non, jamais on se serait permis une sieste sur les coups de 15h.
- Etre free-lance, c'est à la fois être free et en même temps jamais vraiment. La sieste à 15h est possible, le bouclage d'un papier sur les coups de 23h, aussi.
- Multiplier les employeurs comme j'ai choisi de le faire pour l'instant, c'est s'exposer à la multiplication des exigences, des délais, des consignes. Il faut être très organisé.
- Je ne suis pas organisée.
- Etre free-lance c'est donner l'illusion à ses employeurs qu'on est organisée.
- Quand on se retrouve d'un coup d'un seul avec toute cette liberté, on se dit qu'on va en profiter pour faire des choses folles, comme aller courir le matin.
- Ou marcher un peu tous les jours.
- Au moins aller chercher le pain.
- Ok, pour acheter ses clopes.
- Je n'ai pas fumé plus que d'ordinaire. Ni mangé. Mais je sens que y'a moyen. Du potentiel.
- Les enfants, qu'ils aient dix ans ou moins n'ont pas le cerveau conçu pour comprendre le concept du "maman est là mais elle travaille".
- Etre free-lance quand on n'a pas de bureau fermé c'est être condamnée à passer des coups de fil professionnels avec un irritant "chuis la carte, chuis la carte, chuis la caaaaaaaaaarte" en musique de fond (que le créateur de l'insupportable Dora crève dans d'atroces souffrances dévoré par chipper le renard).
- Dès septembre je rejoins donc un collectif quelconque de pigistes.
- Si j'ai de quoi payer.
- Quand tu es free-lance, tu n'as qu'une obsession, finir les commandes à temps. Une fois que c'est fait, tu n'as qu'une angoisse: qu'on ne te fasse plus de commandes. Mais entre temps, c'est le pied.
- Marcher dans la rue sur les coups de 11h du matin sans endroit précis où aller, c'est divin.
- Quand tu es free-lance, l'annonce d'une grève de l'école ne provoque pas le même séisme qu'avant. Tu peux aussi prendre un rendez-vous en urgence chez l'ophtalmo pour le machin qui s'est fait exploser ses lunettes dans la cour de l'école. Et aller chez l'opticien dans la foulée. Et inscrire la petite à l'école (trauma) (on y reviendra). Ok, à part toi (et encore) personne en réalité ne saisit que free-lance ce n'est pas qu'une marque de pompes hors de prix.
Voilà, je passe pudiquement sur les 28 épisodes de The good wife boulottés ça et là (d'où quelques instants de panique à des heures indécentes pour finir ce qui aurait pu l'être si Hadopi faisait son boulot et me coffrait définitivement) (en attendant si will et alicia pouvaient niquer une bonne fois pour toutes ça m'arrangerait) (c'est la seule chose qui m'intéresse, les histoires judiciaires ç'est bon) (je SAIS qu'ils finiront pas concrétiser mais ça ne change rien, je suis chaude comme la braise en attendant que ça arrive).
Je passe également sur l'état absolument cataclysmique de l'appartement (le churros avait raison de se marrer, non seulement je ne passe pas le chiffon mais je m'étale et rajoute donc du bordel au bordel).
Je vous laisse, promis je vais prendre un peu de recul avec tout ça, ce blog reprendra assez rapidement une activité normale pendant laquelle j'éviterai de vous exposer mes contingences matérielles et existencielles. Merci encore pour les encouragements, les conseils, les expériences partagées ici. Je sais que le mot est galvaudé par le web 3.0 mais je me sens bien dans notre communauté. J'espère que vous aussi.
Edit: la photo, c'est pris de mon Iphone (mon cadeau à moi que je me suis fait après ma démission), mercredi, après un rendez-vous dans les beaux quartiers. J'ai remonté le jardin des tuileries jusqu'au palais royal, avec Christophe dans les oreilles (j'ai déjà dit à quel point je vénère Christophe ?). Il y avait cette lumière dorée au dessus de la grand-roue et cette presque douceur qui semblait murmurer que le printemps n'allait plus trop tarder. Pour la dix-millionnième fois depuis que j'y vis, je me suis dit que malgré tout ce qui fait que Paris ça craint (à cause de l'argent surtout), c'est une mother fucker de belle ville.
Bon week-end...