Quand j'étais petite, je voulais être fermière. C'était dû en grande partie au fait que l'été nous passions souvent une semaine ou deux dans une maison de famille en Saône et Loire, accolée à une ferme. Je peux encore sentir l'odeur du lait que nous allions chercher tous les soirs avec ma soeur et que ma mère faisait bouillir. Mon père mangeait la peau qui remontait à la surface en s'extasiant, pendant que nous faisions la moue parce que c'était dégoutant.
J'avoue, ma vocation n'était pas sans rapport non plus avec le béguin que j'éprouvais alors pour le fils aîné du paysan, qui du haut de ses quinze ans me paraissait aussi torride que Patrick Swayse (bien que ce fut avant Dirty Dancing, je suis hélas un poil plus vieille que je n'en ai l'air). Je ne vous dis pas la fierté quand il me baladait derrière sa 103 dans la cour de la ferme. J'étais Lady Di.
Après, ça m'est passé, d'autant que mon amoureux de CM2 (pas le fermier à moto, celuis de mon âge) (le ringard) était asthmatique. Il m'était donc apparu évident que nous ne pourrions pas réaliser mon rêve de céréalière dans la Beauce.
C'est en outre à ce moment là que j'ai reçu l'appel de Dieu et que j'ai entamé ma période "je veux devenir bonne soeur".
La suite on la connait, je me suis finalement éloignée de la religion - une histoire de curé pédophile qui m'a comme qui dirait un peu déçue - (pas de panique, ce n'est pas moi qu'il tripotait, il était branché petits garçons, mais quand même).
Bref, pourquoi ce coming out paysanesque ? Parce qu'il y a quelque temps, l'office du tourisme de l'Auvergne m'a proposé de nous inviter, le churros, moi même et notre portée, dans le Puy de Dôme pour un "week-end à la ferme".
J'avoue qu'au départ, j'ai eu des scrupules. D'ordinaire, quand nous souhaitons partir en famille, nous avons pour habitude de payer notre périple. Là, c'était cadeau. J'en ai parlé aux enfants et au churros, leur décrivant l'offre alléchante et leur confiant mes états d'âme.
Leur réaction a été sans appel et unanime.
"On n'en a rien à faire maman, que tu sois une vendue. Ça a l'air trop stylé le programme". Je les ai bien élevés vous croyez ?
Toujours est-il que j'ai accepté (je viens de coller ma corruptilbilité sur le dos de mes pauvres enfants sans défense, c'est moche, je sais), non sans prévenir que je ne parlerais que de ce qui nous aurait plu.
Je ne pensais pas alors que ces trois jours seraient aussi denses, riches et joyeux et que j'aurais donc envie de parler de tout. Je ne vais pas vous faire un carnet détaillé de toutes nos activités, mais juste vous confier le choc visuel éprouvé dès que nous nous sommes éloignés de Clermont-Ferrand en direction de Mont Dore.
On croirait que des bouteilles de Volvic vont jaillir de tous les côtés.
Sans rire, c'est valonné, vert, doré par endroits, avec cette lumière qui perçait derrière des nuages un peu trop nombreux mais finalement opportuns. Ce temps mi figue mi raisin donnait en effet du relief aux plaines et rendait les volcans embrumés encore plus impressionnants.
Autre intérêt: pas d'inquiétude au niveau des concombres ou autres crudités bactériologiques: en Auvergne, on semble se méfier des légumes. Notre hôtesse, la propriétaire de la maison d'hôtes "La vigneronne" à Montpeyroux (sublime village), nous a littéralement gavés de saucisson, galantine, et autre jambon de pays qu'elle fabrique elle même avec son mari (en plus d'être dans l'hotellerie, ils possèdent une porcherie, cultivent leurs céréales et vendent leurs produits sur le marché) (rien que de la regarder j'étais fatiguée). La charcuterie, c'était l'entrée. Venait ensuite le plat de résistance, truffade ou aligot, accompagné de saucisses ou côtes de porc. Pour ceux qui n'aimaient pas l'aligot, la brave femme avait prévu un accompagnement "plus léger".
Gratin de pâtes au saint nectaire.
Bref, on est revenus gras comme du tripoux mais contents comme tout. D'autant que notre programme, génialement concocté par l'Office du tourisme, nous a permis de visiter la chèvrerie pédagogique de Mont Dore (accueil formidable, chèvres et chevreaux adorables à qui Rose a donné des biberons comme si elle l'avait fait toute sa vie) (sans parler du churros qui s'est découvert une nouvelle passion: la traite des chèvres. Un coup de main qui m'a limite inquiétée à vrai dire) (il ne voulait plus partir et je l'ai surpris en train de boire le lait à même le pis) (je ne l'embrasserai plus jamais).
La chèvrerie de Mont Dore, donc, mais aussi la ferme Bellonte, où de père en fils et de mère en fille ils fabriquent un Saint nectaire fermier à se taper le cul par terre de bonheur et où nous avons assisté justement à la confection du fromage.
Et puis enfin, la ferme pédagogique de Montpeyroux, où les enfants ont appris à s'occuper de tous les animaux et sont tombés en amour de petits porcinets ressemblant à s'y méprendre à ceux des dessins animés.
Bref, j'ai découvert une région qui jusque là était pour moi associée, en bonne lyonnaise que je suis, à la malédiction de la "traversée du massif central" éprouvée plus d'une fois pour aller en Bretagne avec mes parents et frères et soeurs, entassés dans une voiture qui toussait et crachait à la moindre montée.
La chérie, ma fille ainée, a eu ce mot qui pourrait être celui de la fin: "C'est bête quand même, l'Auvergne on n'y fait pas attention, alors que ça assure grave". Après, elle a ajouté: "On devrait toujours avoir des week-ends organisés. Au moins comme ça, on fait des choses, ça change".
Dire que c'était ma préférée.
Voilà, je vous laisse avec des photos de ces trois jours, promis après j'arrête de me la jouer National Geographic, ce mois de juin a été particulièrement riche en déplacements divers et variés et ma foi, je ne m'en plains pas, mais c'était assez inhabituel (en témoigne la réflexion suintant l'ingratitude mais néanmoins réaliste de ma fille, en effet, on est plutôt du genre moules qui émergent vers 16h quand tout ferme...).
Au pilori, la blogueuse (hin hin hin) (en même temps c'était pratique dans le temps pour faire sécher ton vernis)
Edit: Par contre, j'ai essayé, en bonne journaliste, de comprendre ce que Brice Hortefeux avait voulu dire concernant les Auvergnats, comme quoi quand y'en a un ça va, c'est quand il y en a plusieurs... Je ne sais pas si je suis bien tombée ou si Briçou fréquente des cons, mais franchement, ils étaient tous sympas, les Auvergnats.
Edit2: Un grand merci encore à Camille et Cécile qui se reconnaitront. Et si vous avez envie d'aller découvrir cette région surprenante, je vous suggère d'aller faire un tour par ici:
Le site web de l'Auvergne et plus précisément la page Séjour à la Ferme en Auvergne.
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