"Pensées de ronde" a eu six ans il y a quelques jours. J'avoue ne pas trop savoir qu'en dire, j'ai l'impression chaque année de me répéter un peu, donc je serai brève.
On me demande souvent si mon blog a changé ma vie et j'ai tendance à répondre spontanément que oui. Après, si je réfléchis, ce blog n'est pas à proprement parler un être vivant ni même quelque chose qui me serait tombé dessus. Peut-être qu'il est plus juste de dire qu'en le créant, j'ai amorcé sans en être consciente un virage dans mon existence. Et qu'en effet, si mon blog n'a pas forcément changé ma vie, il m'a changée moi.
Je crois pouvoir affirmer que sans "Pensées de ronde", je n'aurais pas écrit de livres, tout aussi légers soient-ils. Je n'aurais pas co-écrit cette pièce de théâtre, jouée pendant un an dans une salle grande comme un mouchoir de poche. Je n'aurais pas rencontré certaines personnes qui comptent aujourd'hui. Je ne carresserais pas ce rêve un jour de... Je n'aurais pas sollicité Psychologies magazine pour y écrire. Je n'aurais pas imaginé avoir la force de démissionner pour tenter l'aventure free lance. Je ne travaillerais pas pour un célèbre quotidien dont je me faisais jusque là tout un Monde. Je n'aurais pas non plus interviewé Bjorn, chanteur d'Abba, à Stokholm. Je ne saurais pas ce qu'est un billet sponsorisé, je ne connaitrais pas l'utilité de google analytics et je prendrais sûrement beaucoup moins de photos débiles et de qualité douteuse. Je n'aurais pas infligé au churros quelques humiliations, la première étant donc d'être connu par certains de ses collègues comme étant El churros. Ma mère n'aurait pas à trembler régulièrement à l'idée que j'écrive une insanité. Mes proches cesseraient d'avoir peur que la moindre de leurs incartades soit rapportée avec force exagération. Personne ne saurait que j'ai déjà mangé du caca, que je sens un peu des pieds et que j'ai des hémorroides (un doute m'assaille, je ne suis pas sûre en réalité d'en avoir déjà parlé). Je n'aurais probablement jamais reçu ce livre sur les femmes fontaines en envoi presse. Et je ne me serais probablement pas fourvoyée dans deux ou trois projets dont je souhaite ardemment qu'ils restent au fond, très au fond d'un quelconque tiroir.
Sans blog, surtout, je crois que mes réveils seraient plus difficiles, parce que non, mon premier geste après avoir posé le pied par terre n'est pas de boire de l'eau citronnée pour améliorer mon transit mais, une fois pipi, douche et ce qui s'en suit expédiés, je sacrifie au même et immuable rituel: lire les premiers commentaires en buvant mon thé. Les matins, rares, où je n'ai pas publié, je me sens comme en manque. J'en parlais récemment à William, qui m'a dramatiquement déclaré: "tu es complètement accro, ma fille". Comme souvent, William a parfaitement résumé la situation.
Je suis accro à cette écriture si particulière qui m'offre ce qu'un livre ne permet jamais, même aux écrivains les plus lus: cette possibilité d'avoir un retour quasi-immédiat de ceux qui me lisent. Je suis accro à vos discussions, à la plume de certaines d'entre vous dont je me demande quotidiennement pourquoi elles ne créent pas leur propre blog, à la gentillesse d'une grande majorité de ceux et celles qui viennent ici, à cette - et le mot est galvaudé mais je n'en ai pas d'autre - communauté qui s'est créée, année après année.
Je me souviens parfaitement de ce premier billet posté le 18 janvier 2006, il s'appelait La cabine. A l'époque, je n'avais dit qu'au churros et deux copines grand max que je m'étais lancée dans cette entreprise. Le soir même, il y avait eu un commentaire, d'une inconnue. Puis le lendemain, un autre. Et de cinq visiteurs, je suis passée à 10, puis à 50. Quand un jour le chiffre de 200 s'est affiché, je me suis dit que ça faisait un amphi. Un amphi de gens venus lire ma prose qui était, il faut bien le dire assez désespérée. J'avais eu un vertige.
Je ne vais pas vous balancer les statistiques actuelles, je ne supporte pas bien quand au détour d'un anniverblog les gens le font, en mode "j'en ai une énorme". Mais disons que l'amphi est plus grand. Et ça me donne tous les jours un vertige.
Voilà, je suis au regret de vous annoncer que je n'ai dealé avec aucun annonceur pour vous faire des cadeaux à cette occasion, je sais que ça se fait ailleurs mais je n'ai tout simplement pas vraiment su qui contacter (en fait je n'ai pas tellement essayé). Peut-être cela dit y'aura-t-il prochainement un concours qui devrait vous plaire. Je crains par ailleurs de n'être pas très disponible cette semaine, j'ai comme qui dirait pas mal de trucs à rendre pour hier. Et je n'étonnerai personne en vous apprenant qu'en ce lundi, Rose est à nouveau à mes côtés, brûlante de fièvre. Angine, cette fois-ci. Vous me direz, on varie les plaisirs et c'est tant mieux. Je vous confiais récemment mon sentiment d'être l'Elue, je crains qu'il n'ait été remplacé par la certitude d'avoir merdé quelque part, voire de payer quelque chose d'affreux que j'aurais fait dans une autre vie. Si ça se trouve, j'ai balancé un résistant ou bien couché avec Pétain. Voire les deux. Auquel cas, je comprends et je la boucle.
En attendant, je vous laisse, en vous remerciant à nouveau de votre fidélité. Je sais que parmi vous, il en est certain(e)s qui étaient là dès ces premiers billets, je les embrasse. Ainsi que ceux qui viennent à peine d'arriver, ceux qui ont décidé de ne plus jamais revenir et ceux qui pointeront leur nez demain.
Bonne journée.
Edit: vous noterez que je ne déroge pas à la règle qui veut que lorsqu'on commence une bafouille en prévenant qu'on sera bref, c'est pile à ce moment là qu'on se prend les pieds dans le tapis et que l'on devient long, loooong, looooooooong.