Vendredi c'était mon Zermati's day. Quatrième rendez-vous, et pas des moins intéressants.
On est dans un premier temps revenus sur cette expérience des trois faims, la petite, la moyenne et la grande. J'ai fait part de mes observations et de ma conclusion: avant l'heure c'est pas l'heure, mais après, c'est mort aussi. Réponse du doc: "on s'en doutait n'est-ce pas que c'était la moyenne faim la meilleure, l'important c'était d'en avoir la preuve".
Ensuite, on a parlé de cette histoire de respiration, et là, j'ai avoué que si mon corps et moi on commençait à être bien en phase avec la faim et en particulier la bonne, celle qui fait qu'on mange avec plaisir, sans culpabilité et sans non plus se gaver, en revanche les instants de "pleine conscience" comme il les appelle, bof.
En gros, je n'ai pas trouvé le temps. A moins que ce soit la volonté qui ait manqué. Le fait est en tous cas que j'ai dû faire l'exercice deux fois grand max sans vraiment en ressentir un bénéfice quelconque.
"Pas grave", m'a rassuré docteur Z, "il faut savoir que c'est ce qu'il y a de plus difficile, la pleine conscience. Il faut du temps avant d'y parvenir".
J'en profite pour faire une petite apparté, je crois que c'est ce que j'apprécie énormément chez ce médecin. Il n'y a pas de reproches, pas d'objectifs à atteindre, pas de contrôle de poids à chaque rendez-vous. J'ai tellement été habituée avec les nutritionnistes qui m'ont suivie à ces séances de remontrances ou de félicitations (qui à mon avis reviennent au même d'ailleurs) que je n'en reviens pas de ne plus être dans cet espèce de passage d'examen perpétuel. On n'est pas dans la "progression", on n'est pas dans une sorte de processus où chaque étape doit être franchie avec succès sous peine de reprise immédiate de poids. Et c'est, je pense, le point central de cette thérapie. Pas de chiffre à atteindre, pas de promesses de minceur, pas de discours sur la volonté, le contrôle, pas d'aliments proscrits, pas de plus ou moins 60 grammes de pain par jour. Pas de points rouges jaunes ou verts, pas de leçons de nutrition ni de théories sur les protéines qui te font perdre du gras mais gagner du muscle.
Fin de l'apparté.
Donc, pour la respiration, va falloir persevérer. Et d'ailleurs, même, on va la mettre de côté pour se concentrer sur un exercice similaire qui est celui de la dégustation. Pour me l'expliquer, le docteur m'a fait fermer les yeux et me détendre. Puis il a mis dans ma main un petit aliment dont j'ai dû apprécier le toucher, puis le "son" qu'il faisait à mon oreille quand je le faisais rouler entre mes doigts, puis l'odeur. Ensuite j'ai pu porter ce qui s'est vite avéré être un raisin sec à ma bouche, le faire rouler autour de ma langue et enfin le couper avec mes dents, en extraire la pulpe pour finir par le mâcher et l'avaler.
Tout ça sans ouvrir les yeux et en essayant de me concentrer uniquement sur les sensations olfactives, auditives et gustatives de la dégustation.
"Qu'est-ce qui s'est passé, alors ?", m'a demandé docteur Z une fois le minuscule grain mangé.
Ce qui s'est passé ? Je ne saurais vraiment l'expliquer, une explosion de goûts dans ma bouche que je n'aurais évidemment pas pu ressentir si je ne m'étais pas attardée à ce point dessus. L'impression aussi d'avoir mangé beaucoup plus qu'un seul raisin sec. Le plaisir aussi de l'acidité de la pulpe sur mes papilles.
Voilà, pour les deux semaines à venir le mot d'ordre est de tenter de commencer chaque repas par trois minutes de "pleine conscience". ça peut être aussi au moment du café, s'attarder sur la température de la tasse, sur les effluves du breuvage, la chaleur de la première gorgée. Autant vous dire que ce n'est pas si facile. Mais il est certain que ça évite de se ruer sur la bouffe et que ça permet de déclencher tout un processus de salivation et de dégustation.
Sinon, à part ça, j'ai parlé au docteur de ma difficulté à identifier la satiété, de ma tendance à m'arrêter "parce qu'il faut" plutôt que parce que je n'ai plus faim. Il m'a confirmé que ce "parce qu'il faut" n'est pas la meilleure des choses, toujours cette histoire de contrôle qui ne peut être pérenne. Mais pour l'instant ça aussi ce n'est pas grave, on n'en est pas là, on n'a pas commencé le travail sur les émotions, chaque chose en son temps. J'ai aussi demandé si le fait de sauter un repas le soir après un gros déjeuner de boulot était une bonne ou une mauvaise chose. Il m'a répondu qu'il fallait voir l'acte de manger comme celui de recharger un téléphone portable. "Cela vous vient-il à l'esprit de charger votre téléphone si la batterie ne s'est pas vidée ? Non. Vous attendez en général que le voyant s'allume. Votre voyant, c'est la faim. Si vous ne ressentez aucun symptôme, c'est que vous n'avez pas besoin de manger. Dont acte".
Voilà pour cette fois-ci.
Edit: Jamais 2 sans 3, cette fois-ci c'est ma Rosette qui est malade et je dois avouer que je déteste ça...