C'est fou comme on s'habitue à voir flou. Je me fais souvent cette réflexion à l'occasion de mes visites chez l'ophtalmo, où ce dernier constate systématiquement que ma vue a encore baissé, sans que ça ne m'ait vraiment alertée. Le jour des nouvelles lunettes, il y a comme un vertige devant tant de clarté. Il me faut personnellement deux ou trois jours pour m'y faire et j'en viens presque à regretter le flou de la veille. Passé ce délai, je me demande comment j'ai fait pour attendre si longtemps pour changer ces foutus bésicles alors que tout est plus facile quand on peut lire une carte de métro sans chopper une migraine.
Hier, quand le Churros a reçu le coup de fil de sa future patronne lui annonçant que c'était bon, qu'au terme de plusieurs entretiens il était finalement le candidat retenu, ça nous a fait un peu cet effet là.
Depuis six mois que les ennuis dans son ancien job avaient commencé pour aboutir à un départ plus que forcé, on avait pris l'habitude que l'avenir soit légèrement obscurci. On naviguait à vue, désorientés les premiers jours et puis finalement, faute d'avoir le choix, on s'était accommodés, comme les yeux tentent de compenser un astigmatisme congénital. Après tout, il y a plus grave, après tout, il y a la pige, après tout, ça donne du mou à la nounou, après tout, demain est un autre jour, après tout on a des économies, après tout c'est sûrement un mal pour un bien.
Et puis, donc, hier, le coup de téléphone que tu n'oses pas espérer de peur que ça te colle la poisse. Et instantanément, l'impression d'avoir chaussé de nouvelles lunettes.
Soudain, tout s'est éclairci. Et ce matin, ce léger vertige.
Edit: un grand merci à tous ceux et celles qui se sont souciés de nous et de lui pendant ces quelques mois.