Hier soir, le churros m'a dit : "tes parents sont là, c'est l'occase de se faire un cinoche sans que ça nous coûte 300 euros la soirée. En plus on sortirait en semaine, on dirait qu'on aurait vingt ans, ce serait bien, non ?". Je me suis fait un peu prier, j'ai tellement de choses dans la tête que je n'ai même pas la place pour y faire entrer une histoire, lui ai-je répondu.
Et puis j'ai senti qu'il était déçu, que mon nombril autour duquel je fais pas mal de tours en vélo depuis quelques jours allait finir par lui sortir par les yeux. Aussi, c'était tentant, c'est notre truc à nous, le ciné au MK2 bibliothèque et le club sandwich au Frog dans la foulée. Pinte de blonde pour lui, corona pour moi.
J'ai donc enfilé mes pattes d'ours et on s'est retrouvés devant le ciné pour aller voir Angèle et Tony.
Seigneur comme il a eu raison de me forcer.
Je vous en supplie, courez-y. C'est une comédie romantique qui n'a rien à envier aux américaines. Même si le héros pèse 100 kilos, qu'il est chauve et vit de la pêche dans une mer hostile. Même si l'héroine est une ex-taularde un peu - beaucoup - inadaptée, qui traîne ses guêtres en regardant ses pieds parce que fixer les gens dans les yeux c'est trop lui demander. De là à leur parler, hein.
Tout ça sur fond de misère sociale, de conflits entre les pêcheurs et les importateurs de poissons qui tuent le métier.
Pas glamour ?
Non, pas glamour. Et pourtant...
Pourtant le regard de Clotilde Hesme est l'un des plus poignants du cinéma français. Pourtant, le Tony, tout brut de décoffrage qu'il est, se révèle aussi torride qu'un Georges Clooney. Peu à peu, alors qu'il s'agit du couple le plus improbable qui soit, une tension sensuelle s'installe entre eux, et quand ils finissent par s'attraper, foi d'amatrice invétérée de bluettes, ça vous fait quelque chose là, oui, ici, non, un peu plus bas. Oui, là.
On pleure, aussi, parce qu'il est question d'une mère qui a cassé le lien avec son petit et qui s'emploie maladroitement à le réparer. On pleure parce que ces gens rudes comme le climat de la basse-normandie sont aussi merveilleusement humains. On pleure et on rit, on respire les embruns et on a envie de filer direct dans un train pour Caen et ses environs, pour regarder les vagues s'écraser sur les falaises et aller vérifier si les crabes font mal quand ils vous pincent les doigts.
J'avais adoré Clotilde Hesme dans les Chansons d'amour, je l'avais également admirée lors de ce concert d'Alex Beaupin et ses friends. Hier, je me suis dit qu'elle était pour un bon moment une de mes actrices préférées. Et Grégory Gadebois a intérêt à se faire moins rare sur les plateaux de cinéma. De toutes façons, j'irai le voir sur les planches, sinon, je crois qu'il est de la Comédie française.
Edit: Last day aujourd'hui au travail, pot de départ ce soir, d'autres larmes en perspective, de joie et de tristesse, parce que la vie n'est finalement que ça, un savant mélange des deux. Bonne journée.