J'ai appris à aimer la corse avec lui. Un ami de mes parents, de ceux pour qui ils auraient porté le cadavre, comme on dit. Nous avons passé des étés à camper ensemble sur cette plage, comme des romanichels que nous étions tous, avec pour seule douche la rivière d'eau douce qui se jetait dans la mer. Je l'entends encore appeler mon père quand le soir tombait: "Dominique, il ne serait pas pastis moins le quart?" Jamais Dominique ne l'a contredit, quand ce n'était pas lui d'ailleurs qui surveillait l'heure.
Je crois qu'en revenant désormais tous les ans à quelques centaines de mètres de notre campement de fortune, c'est ce bonheur perdu que je cherche à rattraper. Avec succès, souvent, même si mes 15, 16, ou 17 ans sont bien loin.
Il est mort ce matin, emporté en deux mois par un crabe sans pitié. Et sur cette plage, ce soir, il me semble les voir, tous les quatre, ma mère, mon père, Patrick et Criquette, trinquer à l'été, au soleil et l'amitié.
So long, Patrick. Je veux croire qu'un peu de toi restera pour toujours à Prunete et que là haut il sera désormais pour l'éternité l'heure de trinquer à l'été, au soleil et à l'amitié.