J'aime ce souvenir d'une après-midi entre filles, première vraie séance de coiffeur de ma chérie qui subitement est devenue grande. Comme si chaque cheveu qui tombait par terre emportait un peu avec lui de son enfance.
J'aime ce minuscule restaurant japonais à deux pas de chez nous, seulement deux tables et un chef adorable. Le mercredi, les grands et moi nous y allons pour le plaisir des brochettes boeuf fromage et des soupes miso.
J'aime avoir pu déposer en loucedé à la loge du collège le livre d'histoire géographie de la chérie qui l'avait oublié. C'était sa première étourderie, elle qui vérifie scrupuleusement son cartable tous les soirs, dix fois plutôt qu'une. L'idée d'avoir une croix sur son carnet de correspondance lui était tellement insupportable qu'elle a pris le risque d'en prendre au moins deux de plus en m'appelant des toilettes avec le portable d'une copine. J'aime avoir été disponible pour lui sauver la mise, moi qui l'ai si peu été pendant des années.
J'aime encore plus qu'elle m'ait raconté que la voyant paniquée à l'idée d'être punie, le machin ait glissé de force son propre livre dans le cartable de sa soeur, lui expliquant qu'il préférait avoir une croix plutôt que de la voir pleurer. Ces deux là se détestent 99% du temps et sont capables de s'étriper pour un regard jugé désagréable ou n'importe quelle raison dépassant l'entendement. Mais le 1% restant, celui qui finalement compte plus que tout, ils donneraient leur vie pour l'autre sans l'ombre d'une hésitation. Parfois je jalouse presque la magie de cette gemellité. Souvent, je suis terrorisée, aussi.
J'aime avoir pris pour la première fois cette semaine un thé au Flore, un matin tôt où il pleuvait des cordes. J'y avais rendez-vous avec une vieille connaissance professionnelle qui lui aussi faisait son baptême florien. Et c'est con mais j'ai adoré, en fait. Même si à l'intérieur, ça ne ressemble presque à rien.
J'aime en ce moment ce plaisir que je prends à être maman. Je ne dis pas que je ne l'étais pas avant, peut-être même l'étais-je autant, voire mieux, je n'en sais rien. Mais ce temps dont je dispose aujourd'hui avec eux, même s'il est pavé de "chtttttt, moins fort j'ai une interview" et de "je travaille encore dix minutes et après je vous fais réviser/prendre le bain/manger", j'ai la sensation qu'ils se souviendront aussi de ça, de rentrer et que je sois là. En tous cas, moi, je m'en souviendrai.
J'aime cette envie ces derniers jours de lire des livres sucrés sans valeur ajoutée. Pour le plaisir de lire des noms de quartiers londonniens ou new-yorkais. Peu importe l'histoire, je veux juste m'avaler des comédies romantiques au kilomètre. Une compulsion à zéro calorie et sans nicotine, que demander de mieux ? Je sais que ça me passera mais je vénère toutes ces erzatz de Candace Bushnell. Leurs bouquins ne cassent pas trois pattes à un canard mais ils sont comme un plaid en Alpaga que j'enroulerais autour de moi, lovée dans le fauteuil club d'un hôtel de montagne. Il y aurait de la neige aussi.
Bonne journée.
Edit de 8h25: Billet écrit AVANT que Rose ne dégobille à nouveau toute la nuit et que je me retrouve donc pour une énième fois avec un lardon à garder au lieu de travailler. En fait je retire tout. Je conchie la maternité.