Sur l'avenue d'Italie à quelques mètres du métro Maison Blanche, un bouquet de roses un peu défraichies est accroché autour d'un arbre tout nu. Au dessus, une affichette de la gendarmerie indique que le 8 janvier dernier à 2h14, un cycliste a été fauché à cet endroit là. Par un véhicule qui a pris la fuite. Prière d'appeler pour tout renseignement ou témoignage en rapport avec l'accident.
Je ne sais pas pourquoi hier plus qu'un autre jour j'ai levé les yeux en passant devant ce bouquet d'adieu. Je ne sais pas bien non plus pourquoi j'en parle aujourd'hui. Peut-être parce que désormais j'aurai en mémoire cette vie arrachée un soir d'hiver, à deux pas de chez moi. Une pensée aussi pour celui ou celle qui, pris de panique sans doute, a préféré accélerer plutôt que s'arrêter et qui ne sait peut-être même pas que le 8 janvier à 2h14, un coeur s'est arrêté sous ses roues. Est-ce qu'on peut continuer à vivre après, comme si de rien n'était ? Est-ce que, dans l'éventualité où tous les moyens mis en oeuvre pour le retrouver échoueraient, ce bref instant où tout a basculé finira par disparaitre de la mémoire du chauffard ?
Et si j'avais été au volant, n'aurais-je pas eu moi aussi la tentation de m'échapper, plutôt que d'affronter l'horrible réalité ? Y aurais-je cédé ?
Hier, en remontant l'avenue d'Italie, je pensais à tout cela sans qu'aucune certitude ne s'impose. Ou plutôt si, une seule. Au détour d'une rue, à 2h14 un dimanche de janvier, l'un est devenu victime et l'autre un meurtrier. Sans probablement que ni le premier, ni le second, n'aient pu imaginer dans les secondes qui précédèrent le choc, que tel était leur destin. Etrange chose, tout de même, que la vie.