Je ne sais pas comment c'est arrivé, mais j'ai lâché. Pas le poids ni la peur de regrossir un jour, sur ce point je crains d'avoir encore du chemin à parcourir. Mais tout le reste. Les bourrelets sur le ventre quand je suis en deux pièces sur la plage, l'idée de mes fesses en gelly que je ne vois pas mais les autres si ou mes seins qui semblent vouloir faire un chateau de sable quand je fais du topless.
Du topless d'ailleurs, je ne fais que ça ici, dans cet endroit où ne viennent à côté de ma serviette que des habitués qui se foutent bien de savoir si mon bonnet D s'est effondré et depuis quand. ça n'est pas la première fois, mais en revanche c'est assez inédit qu'en fin de journée, avec ma voisine devenue au fil des ans une bonne copine, je fasse des abdos fessiers en culotte pour le plus grand bonheur des passants. Je crois que si l'on m'avait dit que j'accepterais de faire le chien qui pisse les seins à l'air dans un lieu tout de même public, j'aurais explosé de mon rire gras dont la réputation n'est plus à faire.
Vous allez me dire que quand on s'en fout de tout ça, on ne fait pas des abdos fessiers au lieu de bouffer une glace. Et bien c'est justement ça la perversité du truc, j'imagine. De la même façon que le mec vient à la fille célibataire quand elle ne l'attend plus (ou l'inverse), peut-être que l'exercice, lui, s'impose à la feignasse le jour où elle n'en espère pas plus que le bien être qu'il procure après coup.
Attention, je parle ici de 15 minutes à tout péter par jour qui en outre ne sont absolument pas suivies de courbatures, ce qui selon le churros n'est pas hyper bon signe. En même temps, comme il m'a dit avec sa légendaire sagesse: "pour faire des abdos, il faut déjà en avoir, c'est comme ça, on ne prête qu'aux riches et ça ne vaut pas que pour les banques" (je me demande si l'amour ne dure pas quinze ans). Pourtant, qu'est-ce qu'on peut jurer notre race quand on les fait, je ne vous dis pas, c'est toutes nos aïeules qui se retrouvent au rang de filles de joie.
Mais bon, voilà, le propos n'était pas de vous annoncer que je comptais prendre la succession de Véronique ou Davina ou que j'allais très prochainement vous donner mes petits trucs sur les meilleures salles de fitness new-yorkaises. Non parce que je me connais assez tout de même pour savoir que cette tocade n'aura qu'un temps et qu'arrivée à Paris j'oublierai jusqu'à l'existence de mes fessiers (eux même m'ayant de toutes façons toujours superbement ignorée, ils ne s'en trouveront surement pas affectés).
Le propos, c'était donc que j'avais lâché du lest, que ce corps lesté de deux grossesses et n'ayant jamais fait de sport que par très courtes intermitences n'était plus pour moi cet été l'objet d'une honte frustrante, m'obligeant à trouver jour après jour une nouvelle façon de passer directement de la position debout à couchée sur le dos.
Je crois que c'est la maturité, le fait, sans conteste, d'avoir malgré tout minci (mais comme en témoigne cette photo prise par violette lorsque nous étions au Grau du roi, on est loin d'une ligne irréprochable) (là je n'étais pas topless, il ne faut peut-être pas m'en demander trop, j'étais alors probablement la seule personne de toute la plage à posséder un maillot de bain taille 42) et peut-être aussi de vivre quasiment à poil depuis trois semaines. Je crois que dans les thérapies d'acceptation de soi, il faudrait passer par là, par des moments où on ne se cache plus de soi. A force de croiser mon reflet dans la maison ainsi, j'ai fini par l'aimer un peu, peut-être. L'aimer, ou, même mieux, m'en détacher. Sans vouloir en faire des tonnes (c'est pas mon genre en plus), c'est comme si soudain je venais de me débarrasser d'un énorme boulet. Et si c'est ça aussi vieillir, alors ok, je prends.
Voilà, à part ça on entame notre dernière semaine ici et je me doute que je ne vais faire pleurer personne sur mon sort mais mon coeur saigne déjà.
Bon week-end.