Que les choses soient claires, avoir un enfant c'est avant tout du bonheur. Non je le dis parce que je ne voudrais pas qu'il y ait de malentendu, hein, celles qui en ont mis un en route ou celles qui en ont déjà, ne le ramenez pas au magasin, franchement, la plupart du temps, c'est plutôt chouette.
Mais il faut quand même savoir que parfois, ça craint.
Un exemple ?
Quand ton enfant attrape des poux.
En fait, les poux, c'est LE truc qui te fait peur du moment où petite chérie - oui chez moi c'est petite chérie qui en attrape, grand loulou lui n'a pas une tête à poux, la vie est une chienne et choisit ses victimes - est scolarisée. D'ailleurs en général, dès le 4 septembre, tout est fait pour alimenter ta névrose étant donné qu'à l'entrée de l'école apparait une énorme pancarte "ATTENTION LES POUX SONT REVENUS". Tu comprendras l'année suivante que cette pancarte est en réalité collée là depuis des décennies et que par honnêteté le corps professoral ferait mieux d'indiquer: "ATTENTION LES POUX NE SONT TOUJOURS PAS PARTIS".
La première fois que tu la vois la pancarte, tu es partagée entre la panique que ton enfant soit contaminée - par les autres bien sûr parce que c'est évident que petite chérie adorable ne PEUT pas être celle qui a fait entrer dans l'école ces sales bêtes - et la naïve certitude que "ça" n'arrive qu'aux autres. Surtout les gens de peu d'hygiène. ça bien sûr tu ne le dis pas parce qu'en vrai tu es quelqu'un de très ouvert et de super tolérant et que ce genre de pensée te fait un peu honte. N'empêche que tu repères assez rapidement le ou les enfants qui te semblent un peu moins soignés que les autres et que faisant fi de tous tes principes de gauche, tu suggères gentiment à petite chérie de ne pas trop sympatiser avec eux ou tout au moins de ne pas leur prêter son bonnet/ses chouchous/sa brosse à la piscine. Forcément, tu obtiens l'effet inverse, tu apprendras plus tard que les enfants se font toujours un malin plaisir de choisir justement pour amis ceux que tu aurais souhaité qu'ils évitent.
Et puis vient le jour où tu ne peux plus faire semblant de ne pas voir ta fille s'arracher le cuir chevelu à force de se gratter. Voire pire, le jour où devant cette chipie de Marie-Catherine, mère vénérable de Sidonie, très propre sur elle mais il faut bien l'avouer beaucoup moins gentille que les copines souillons de petite chérie, la maitresse te suggère d'une voix de stentor d'examiner ta fille dont la tête démangeait et sur laquelle il semble se mouvoir quelques bestioles.
Ce jour là tu pars honteuse, apercevant Marie-Catherine en train de murmurer quelque chose à sa peste. Et tu te doutes de ce qu'elle lui ordonne. La prunelle de tes yeux est devenue celle à qui on ne prête pas son bonnet/chouchou/brosse.
Qu'à cela ne tienne te dis-tu, on va régler ça très vite d'autant qu'il est évident que la maitresse se trompe.
Une fois chez toi, tu installes alors confortablement la chair de ta chair sur tes genoux et commence, telle une maman guenon, à lui chercher des poux. Au départ, tu es même un peu attendrie par ce geste ancestral qui te rappelle celui de ta mère, il y a bien des années. En plus, à première, vue, rien. Tu en étais sûre, il n'y avait aucune raison de s'inquiéter, pas de ça chez nous.
Et puis tu regardes derrière les oreilles. Et là, elle est là. La garce. LA lente. Celle qui en son sein cache un foetus de pou. Accrochée telle une moule à son rocher au cheveu fin et délicat de ta princesse et à priori inoffensive. Accompagnée d'une autre. Et puis d'une autre. Ah, et là... Hiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii. Un pou. A ce moment là, il te faut rassembler tout ce qui te reste d'instinct maternel pour ne pas envoyer valdinguer petite chérie et te précipiter dans ton armoire à pharmacie afin de vider l'intégralité du produit anti-poux acheté un jour "au cas où" sur... TA chevelure.
Oui, à ce stade je dois bien te l'avouer, quand tu trouves des poux sur la tête à ta fille, c'est en général à ton propre crâne que tu penses en premier. C'est moche mais c'est humain.
Bref, comme tu es malgré tout une mère exemplaire, tu en laisses un peu pour ta fille. Qui se met à hurler que ça sent mauvais et qui finit par fondre en larmes parce que dans ton grand énervement tu la préviens que dès demain c'est coiffeur et carré au menton parce que tout couper c'est la seule solution, surtout si elle fait des histoires pour une petite odeur de rien du tout.
En général le produit en question est irritant et sent en effet le suppositoire à l'eucalyptus qu'on aurait laissé tremper dans un bain de purain. Tout le monde se réveille avec une migraine à se taper la tête contre les murs et des cheveux... en carton.
Vient ensuite l'étape du shampoing à l'issue du quel il te faut affronter le spectacle immonde des poux qui, étouffés par la mixture qui d'ailleurs a bien failli exterminer du même coup toute la famille pendant la nuit, tombent un à un dans la baignoire. Un conseil, tu ne te mets surtout pas à penser que quelques heures plus tôt ces bébêtes étaient bien vivantes en train de caracoler sur le duvet de soie de petite chérie. Surtout ne pas chercher à visualiser.
Je passe sur le peigne à pou que tu as d'ailleurs en général perdu. A ce moment là, tu n'en peux plus et chouchoute non plus. Tout le monde hurle et ce n'est plus le carré dont tu la menaces mais la boule à zéro.
Voilà, théoriquement, après toute cette prodédure standard, tu es censée avoir la paix. Sauf que non. Parce qu'une tête à poux est une tête à poux et qu'il y a fort à parier que tu doives renouveler l'opération régulièrement jusqu'à la puberté de petite chérie. A qui tu ne couperas évidemment jamais les cheveux.
Encore un détai et je te laisse. Le plus cool dans l'histoire c'est que pendant les mois qui suivront tu n'oseras plus aller mettre un orteil chez ton coiffeur. Parce que pire que d'apprendre de la bouche de la maitresse que pupuce a des poux, il y a l'air horrifié de la shampouineuse qui arrête séance tenante le délicieux massage du cuir chevelu qu'elle venait d'entamer pour te murmurer sans aucune discrétion que hum, la maison n'accepte pas les poux...
Je te laisse, ça me gratte et il faut que je file à la pharmacie.