L'iroquoise a trois mois. Ou un an. Parce qu'il y a un an très exactement, les spermatozoïdes bioniques de l'homme bravaient toutes les lois de la fertilité, boostés par le calva ingurgité aux Vapeurs de Trouville, pour aller draguer un ovule qui n'aurait jamais dû se trouver là.
Pas farouche l'ovule, évidemment.
Une vraie trainée.
Je pourrais parler d'elle des heures mais ça n'aurait d'intérêt que pour moi. Et son père. Et sa grand-mère. Voire son grand-père.
Donc, je ne m'étendrai pas.
Même si je suis persuadée que vous aimeriez savoir qu'elle rit désormais quand on l'embrasse dans le cou, qu'elle a peur dans l'eau et qu'elle commence à attraper tout ce qui passe à sa portée.
Elle fait également très bien l'escargot mais je ne vous ai rien dit. Voilà, c'est tout.
Ah, si, tout de même il faut que vous soyez au courant: son vocabulaire s'est enrichi de nouveaux mots, greuh, breuh et frout. Et puis ses cheveux changent en fonction du climat. A Lyon par temps humide ils sont presque disciplinés bien qu'un peu bouclés. En revanche, dès qu'on passe le périph, la crête est de retour. C'est notre petite grenouille à nous, notre Joel Collado, quoi.
Enfin - et après promis c'est fini - je ne résiste pas à l'envie de montrer cette photo prise au portable dans le train.
On l'y voit en train de renifler comme un animal l'intérieur de sa main. Qui comme chacun le sait ne sent pas la rose. Ou alors une espèce très musquée.
Mais c'est pour elle la seule façon de s'endormir.
Pour le commun des mortels, cette petite manie ne signifie rien, ce n'est finalement pas plus bizarre, bien que moins commun, que de sucer son pouce.
Mais moi, ça m'émeut. Parce qu'aujourd'hui encore, lorsque je suis fatiguée, que le sommeil tarde à venir, que j'ai le coeur à l'envers ou que tout simplement je cherche l'inspiration, je respire l'odeur de mes doigts dans ce même geste.
Ce n'est pas grand chose, ce n'est pas un talent caché ni même mes yeux bleus, fierté familiale mal placée, que je lui ai transmis. Tout juste une manière de trouver le repos. Et qui sait, ce n'est peut-être qu'une coïncidence. Mais j'aime penser que c'est dans ce type de détails minuscules que réside cette si complexe notion de filiation...