La première fois que je suis allée à Deauville avec l'homme, ce dernier m'a pris dans ses bras sur la plage et d'un ton parternaliste et suffisant m'a dit: "tu vois, là, on le sent tout de suite qu'on est face à un océan. C'est quand même autre chose que ta petite mer méditerranée. Tu ne peux pas comprendre ça, bien sûr, toi qui est de l'Est (imaginer le mot "est" prononcé avec tout le mépris d'un mec de l'ouest). Mais moi, l'Atlantique, j'y suis né et dès que je le vois, je me sens chez moi. Et puis chais pas, c'est pas pareil, un océan, ça ne donne pas la même impression, c'est puissant".
Sauf qu'à Deauville, c'est la Manche.
Une mer, donc. Petite, qui plus est.
Ce jour là, l'homme avait perdu une occasion de se taire. La première d'une longue série.
Des années plus tard, il avait également perdu une occasion de se retenir.
Et résultat, le week-end dernier, c'est à cinq qu'on est revenus sur les lieux du crime.
Ah, Deauville...
Ses petites maisons sans prétention...
Ses hôtels de routards...
Sa lutte contre l'argent sale...
Son bien-nommé bar du soleil...
Ses vieilles bagnoles crasseuses...
Deauville, c'est simple, c'est tout nous.
Parce que faut pas croire, nous aussi on était motorisés. Une authentique Peg-Perego vintage, avec habillage pluie des grands jours, jantes ensablées, panier grande contenance et couverture tricotée main.
Alors bon, Maserati si tu veux mais la ramène pas trop.
De toutes façons, nous, on n'était pas là pour la frime. Ni pour le shopping. Pourtant, le shopping, là bas, c'est très pratique, t'as tout sur place.
Non, nous on avait décidé de battre un record.
Un record calorique.
Beh oui, la dernière fois, si t'avais suivi, on avait surtout fait zizi-panpan. Mais là, forcément, rapport à la marmaille qui nous accompagnait et notamment à number three qui rien qu'à la regarder on SAIT désormais qu'on fera TOUJOURS attention même les jours où soit-disant ça peut pas, on a surtout bouffé.
Attends, t'en connais d'autre toi des plaisirs de la vie si on fait abstraction de la luxure et de la bombance ?
Non.
Donc on a mis un point d'honneur à faire péter les sous-ventrières.
Parce qu'à Deauville, ce qu'il y a de mieux, c'est Trouville, en fait.
Et ses Vapeurs.
Où tu peux déguster les meilleures moules-frites de tout l'univers. Maison les frites. Et du Bouchot, les moules. Garanties.
Là bas, ils mégotent pas non plus sur la chantilly quand tes enfants ils prennent un banana plitch.
Ni sur la crème quand toi tu fais ta chochotte en choisissant du fromage blanc.
Bref, là bas, ils savent vivre.
Et je peux te dire que l'Iroquoise ne s'y est pas trompée. J'aurais pas voulu être la moule sur laquelle elle a louché tout le repas. Gênée qu'elle devait être, la bête.
Voilà, comme je sais que tu es friand des petits mots si savoureux de l'homme, je ne résiste pas à te confier cette déclaration sur la plage alors que le soleil brillait et que nous regardions amoureusement nos enfants courir vers nous...
"Mmmm... J'ai envie d'une moule mais sans les frites, si tu vois ce que je veux dire...".
Je vois.
Edit: Comme tu l'auras remarqué j'ai découvert les fonctionnalités de Picasa que même pas je pensais l'avoir sur mon ordinateur, ce logiciel. Tu notes le sens artistique que le bon dieu a mis à l'intérieur de moi ?
Edit2: Si tu trouves ce genre de reportage photo nul et non avenu, il faut le dire. Premièrement parce que ça me prend un temps t'as pas idée, deuxièmement parce que j'ai vraiment l'air d'une truffe quand je me mets à photographier mon plat de frites ou le cul d'une voiture. Donc si ça te plait c'est cool, mais sinon, faut le dire, quoi.
Edit3: Je ne résiste pas à ta narrer une réflexion de ma fille justement alors que j'immortalisais mon pot de crème: "Mais maman, pourquoi tu prends ça en photo ? Ah bon, pour ton blog ? Mais tu fais quoi sur ton blog ? Tu racontes ta vie ? Ah bon ? Et les gens, ça les intéresse ? Et ben dis-donc."