Hier j'ai fait la tarte rhubarbe meringuée de Zaz et je faisais remarquer que ma meringue eut été probablement meilleure avec un four marchant mieux. Le churros, qui semble ne pas avoir compris qu'avec une femme intermittente de la pige tout espoir de prêt bancaire s'est envolé - pshiiiiiit -, a répondu avec l'air d'y croire, le pauvre, que dans notre future maison, j'aurai un nouveau four.
Je passe sur la tonalité affreusement machiste de sa phrase, je crains que mon nouveau statut ne l'encourage à caresser ses penchants paternalistes et réacs. "Mais oui tu l'auras ta jolie cuisine ma chérie"... Tu sais où tu vas te la mettre ta cuisine mon amour ?
Mais je m'égare.
Préférant ne pas endosser ce soir là mon costume d'Yvette Roudy, j'ai néanmoins lancé que je n'attendrais certainement pas d'acheter cette hypothétique maison dans Paris pour acquérir une cuisinière digne de ce nom.
Il faut savoir que pour le Churros, tout changement d'ordre matériel est angoissant. Ce qui explique que nos étagères Ikea de nos années étudiantes trônent au milieu du salon, que notre table basse achetée sur une brocante en 1997 et déjà démodée à l'époque soit "irremplaçable" et que notre fauteuil club ne partira à la benne que lorsqu'il aura été responsable d'un déchirement anal, ce qui ne saurait tarder. Et pour justifier ce refus pathologique de se débarrasser de nos antiquités sans valeur, il m'oppose toujours le fait qu'on n'est que locataire. Ce qui peut certes expliquer que nous ne faisions pas poser du parquet flottant dans le salon, mais n'a aucun rapport avec le fait de jeter une bonne fois pour toutes les verres à moutarde ébréchés sur lesquels on ne distingue plus que la queue du Marsupilami.
"Quand on sera propriétaire, tu auras une jolie brosse à chiottes, je te le promets. Jusque là, continuons avec ce vieux goupillon à biberon, ma chérie".
Quoi qu'il en soit, nous devisions, lorsque le machin a souhaité participé à la conversation.
Apparté: lorsque le machin s'apprête à prendre la parole à table, un frisson traverse en général l'assemblée. On n'est jamais certain qu'il ne veuille pas répondre à une question qu'on - sa maitresse par exemple - lui aurait posé deux jours auparavant, ou qu'il souhaite poursuivre une conversation qui se serait tenue aux alentours de juin 2005.
Mais là, non, il avait étonnament suivi les échanges. D'où son interrogation:
"Quand vous parlez de votre future maison, vous parlez de votre maison de retraite ?"
Là c'est APRES qu'il ait parlé que le frisson a parcouru l'assemblée. Le pire ? Il n'y avait pas une once de sarcasme dans sa question. De deux choses l'une. Soit cet enfant n'est pas tout à fait comme les autres (dans le genre "différent") ("différent comme "pas pareil"), soit 40 ans ça sent vraiment le sapin. Si ça se trouve c'est les deux.
Edit: La tarte ? Elle était délicieuse. Si ce n'est que la meringue aurait pu... Bref. Il sera toujours temps d'y penser quand on sera dans notre maison médicalisée.