En vacances je lis. Mais beaucoup. A tel point que parfois je me demande si j'ai vraiment besoin de partir aussi loin pour finalement fusionner avec un transat, une pile de bouquins à mes côté. La réponse est oui, je crois que mes livres auraient tout de même moins de saveur si je les avalais dans mon canapé. Il n'empêche qu'en une semaine j'en ai donc éclusé cinq, dont trois gracieusement donnés par ma dealeuse de bouquins.
Celui dont il sera question aujourd'hui n'en fait pas partie, je l'ai payé de mes deniers après avoir lu plusieurs bonnes critiques à son sujet. Je n'ai pas regretté. Il est écrit par une Finlandaise et c'est fou parce que je trouve que cette écriture des pays du Nord a une vraie singularité. Je ne saurais vraiment l'exprimer, mais il y a une façon de décrire les tourments intimes, de parler des corps, de l'amour mais aussi de la nature qui est très particulière, crue sans être brutale, avec une sensualité un peu abrupte. Une économie de mots aussi, des phrases souvent assez courtes, qui rendent la lecture très fluide.
C'était mon quart d'heure masque et la plume, en vous remerciant.
"L'armoire des vieilles robes oubliées", puisque c'est de ce livre qu'il s'agit, avait tous les ingrédients pour me séduire: une histoire de femmes, de grand-mère, de mère, de filles et d'amantes, une réflexion sur le couple, la fidélité, la famille que l'on se construit mais aussi celle qu'on choisit sciemment ou non de mettre en danger. Une réflexion enfin sur la vieillesse, le renoncement et les adieux.
Elsa, pédiatre de renom, est en train de mourir d'un cancer. Alors qu'elle lui rend visite, Anna, l'une de ses deux petites filles, découvre une robe dans l'armoire de sa grand-mère, dont elle ne se souvient pas qu'elle l'ait jamais portée. Elsa lui confie que la robe a en effet appartenu à une autre, qui fut, durant un temps, la maitresse de Martti, l'amour de sa vie. Un secret enfoui qu'Anna n'aura de cesse d'essayer de comprendre, au point de partir à la recherche de la mystérieuse propriétaire de cette robe que son grand-père chéri aima donc alors qu'elle n'était pas encore née.
C'est mélo mais pas tant que ça, grâce à une écriture puissante et sans fioriture. Et puis l'auteur aime profondément ses personnages, avec leurs faiblesses et leurs failles. Elle les aime tant qu'on rêve de tenir la main de la flamboyante Elsa, d'aider Anna à se relever de sa propre rupture, de consoler Martti de cette perte qui s'annonce et de retrouver nous aussi l'enigmatique Eeva, celle qui un jour dit à Marrti: "Ne me demande jamais d'aimer raisonnablement, tu pourrais tout aussi bien me demander de me changer en pierre".
Un vrai coup de coeur pour un livre qui reste en mémoire et qui interroge longtemps après qu'on l'ait refermé.
Edit: L'ouvrage s'ouvre sur une très belle citation de Karen Blixen: "On peut supporter tous les chagrins s'ils font partie d'une histoire ou si l'on en écrit une à leur sujet". A méditer...