Alors donc, on sait désormais tout du patrimoine des ministres actuellement en poste. On sait que Thierry Repentin a un appartement de 50m carrés à Bassens et Alain Vidalies un PEA au Crédit lyonnais s'élevant à 38677 euros (au passage on apprend qu'il y a donc un ministre qui s'appelle Alain Vidalies) (et un autre du nom de Thierry Repentin). Christiane Taubira des terrains agricoles en Guyane et Manuel Vals, 108,71 euros sur son compte courant. Ce qui au passage m'interpelle, espérons pour lui que la déclaration a été faite le 28 du mois, parce que sinon il va peut-être falloir l'aider, Manu. (Qu'est-ce qu'il fait le garçon, entre deux visites de commissariats, il claque son salaire sur Monshowroom ?) Blogueuse, va. Dans deux mois il nous fait de l'affiliation sur la vente des képis.
Bref on sait tout, sauf... l'âge de Yamina Benguigui. Pour elle c'en était trop. Montrer le contenu de sa tirelire, d'accord, donner son année de naissance, FAUT PAS DÉCONNER.
Sérieusement, est-ce que tout ceci a un sens ?
Si Jérôme Cahuzac avait été encore là, vous pensez sincèrement que les yeux dans les yeux il aurait vidé son sac suisse ? Vous pensez sincèrement que l'on peut gagner près de 10 000 euros par mois, avoir un appartement de fonction, ne jamais se payer un seul repas (ce qui en soi ne me choque pas) et n'avoir, même en fin de mois, qu'une poignée d'euros sur son compte ?
Et pour ceux qui semblent avoir joué le jeu, qu'est-ce que ça nous raconte sur eux ? Que certains ont du bien ? Oui, et alors ?
Qu'on peut être de gauche et propriétaire d'une maison à la campagne ? And so what ?
Que la classe politique est plutôt nantie ? Han le scoop, pour avoir brièvement trainé sur les bancs de la prép' ENA de sciences Po Paris (sorte d'incubateur à hommes politiques) - , je vous le confirme, il n'y avait à l'époque pas de doute quant au pedigree de la majorité des étudiants. De gauche comme de droite. Ne faisons pas semblant de découvrir qu'on devient rarement ministre en venant d'un milieu populaire. Et le cas échéant on finit par se foutre en l'air pour un prêt de 100 000 francs sans intérêts. Convertie en euros la somme laisse rêver et en dit long sur le déplacement du curseur depuis la fin tragique de Bérégovoy. (Aux dernières nouvelles, le fossoyeur du quinquennat, j'ai nommé Cahuzac, prévoyait quant à lui de revenir dans l'hémicylcle, classe). Notez que je le regrette - Bérégovoy, bien sûr, mais aussi cette reproduction ad vitam eternam des élites françaises.
Ceci étant dit, que ces gens qui pour la plupart bossent 24/24 et 7 jours sur 7 pour le bien public - je refuse de céder à l'idée selon laquelle nos gouvernants ne seraient que des feignasses corrompues - vivent confortablement ne me choque pas. Je parle pour les deux camps, il m'a été donné l'occasion de suivre des ministres du temps de ma vie d'agencière. Quels qu'ils soient, ils se la donnaient. Cernes et teint blafard compris dans la fonction, nuits sans sommeil et enfants embrassés le week-end ou tôt, très tôt le matin.
Que l'on puisse amasser un certain pécule tout en étant de gauche ne me pose là non plus aucun problème, je pense que le temps de la mutualisation des biens est un poil dépassé et ne fait plus trop partie de la doctrine socialiste et c'est tant mieux (plutôt crever que de partager mes boots Acne).
Ce qui me choque, c'est qu'on puisse nous prendre pour des crétins à ce point là, de penser que l'on va finalement oublier l'incident Cahuzac, sous prétexte que tous les autres se sont mis à poil. Ce qui me choque, c'est de voir les autres, en face, trembler dans leur slip à l'idée que la pratique se pérennise et qu'eux aussi, dans quatre ans, peut-être neuf - on n'est jamais à l'abri d'un alignement des planètes en 2017 - soient contraints d'ouvrir les portes de leur modeste demeure à Rueil Malmaison (au pif). Ce qui me choque, c'est que finalement, on s'en remette à nous, comme si c'était nos affaires, le combi WW de Jean-Marc Ayrault ou que telle ministre soit célibataire avec un enfant.
Qu'il y ait une certaine transparence, oui, bien sûr. Qu'elle aille à ce niveau de détail tout en ne garantissant pas une seconde que ces documents disent vrai, bof. Maintenant, comme je ne veux pas non plus jeter le bébé avec le compte courant, je me dis que cela va peut-être aider à en finir avec l'opacité qui règne en France dès que l'on parle d'argent.
Il n'empêche qu'en attendant, hier, les hauts fournaux de Florange se sont tus. Et ça n'a pas fait parler grand monde. Trop occupés à vérifier le statut matrimonial de Najat Vallaud Belkacem, peut-être.